Louis Lavelle
On peut se demander s’il est utile à l’esprit de fixer son regard sur le mal, soit pour le définir, soit pour l’expliquer, soit pour l’éviter. Car on lui donne, en le considérant de trop près, une espèce de réalité ; il fascine alors la conscience qui, par la peur même qu’elle en a, se sent attirée par lui. N’est ce pas au contraire la pensée et la volonté du bien qui seules doivent donner à notre âme la lumière et la force et, en occupant toute la capacité de notre conscience, ôter au mal la possi¬bilité même de naître ? C’est seulement quand l’activité généreuse commence à défaillir, qu’une place vide se creuse dans la conscience où le mal s’insinue. Et la morale la plus virile ne connaît que des préceptes positifs : elle commande ce qu’il faut faire, elle n’a plus besoin de rien nous défendre...